" Je fuis mes parents et le mari qu'ils veulent me donner. J'essaye de mettre le plus de distance entre eux et moi, et je trouve que la Pension est l'endroit parfait. Et puis, ce n'est pas très cher alors … J'en profite ! "
" La première fois que j'ai vu le jour, le réveil-matin indiquait
1995.02.12 21:42. Selon les dires de ma mère, Jane, c'était une soirée froide et neigeuse, et la poudre blanche recouvrait peu à peu le sol en une épaisse couche. L'accouchement s'était déroulé dans une parfaite tranquillité, et j'étais sortie sans douleur pour ma mère, sans angoisse et contraction. Cette dernière avait déjà choisi mon premier prénom depuis longtemps, en l'honneur de sa mère, ma grand-mère donc, morte quelques années déjà auparavant.
Diane. Mon père, George, ne s'est pas vraiment compliqué la vie, il faut bien l'avouer.
Chelsea est le nom de la ville d'Angleterre où je suis née.
21:43. Ma mère me raconta que je n'avais pas poussé un seul cri ou vagissement, restant calme et silencieuse. Au départ, cela avait inquiété les médecins, mais quand ils avaient fait les derniers examens obligatoires, ils n'avaient relevé aucune maladie qui aurait pu m'empêcher de "parler".
Diane Chelsea Roosevelt était officiellement née.
Ne me demandez pas pourquoi je m'appelle Roosevelt, je n'en ai aucune idée. Mes parents m'ont expliqué qu'un certain Roosevelt avait été président des Etats-Unis, mais ils ne savent pas plus que moi comment le nom est arrivé en Angleterre. Mais peu importe. Donc, nous vivions tous les trois dans un manoir, à l'est de la ville elle-même, plus près de la campagne que de la zone urbaine. C'est là-bas que j'ai grandi, en prenant des cours à domicile. Des précepteurs venaient à la maison, et je n'avais le droit de sortir qu'avec un chaperon, couverte d'un chapeau, gantée et cachée sous une ombrelle qui était censée protéger ma peau pour qu'elle soit aussi blanche que la porcelaine. Ma mère me répétait sans cesse que les hommes préféraient les femmes à la peau couleur ivoire, et que si je voulais trouver un bon mari, je devais respecter ses consignes. J'étais petite à l'époque, je ne comprenais pas vraiment ce qu'elle me disait et je m'efforçais de lui faire plaisir pour la rendre fière de moi.
Une écurie était construite derrière la maison, et j'avais supplié mon père pour qu'il me laisse aller voir les
chevaux de temps en temps. Malgré son apparente appréhension à me laisser approcher d'aussi grandes bêtes de trop près, il accepta sans cacher sa réticence. Maintenant que j'y repense, je sais qu'il a fait cela juste pour me faire plaisir, et aussi sans doute pour combler le vide de ses absences répétées. Car mon père n'était pas souvent à la maison, toujours en déplacement pour les affaires. Chaque soir je me demandais de quelle affaire il pouvait parler, mais mon jeune esprit ne pouvait comprendre ces choses là. Bref, j'allais donc voir les chevaux tous les jours, demandant des pommes aux cuisines pour leur donner ensuite. Je crois qu'à force d'aller les voir, ils commençaient à bien m'aimer et à me connaître. Je trouvais ces animaux nobles et terriblement beaux mais dangereux. Le palefrenier me surveillait toujours de loin, et me répétait sans cesse de ne pas m'approcher trop près. Sans doute qu'il aurait perdu son travail s'il m'était arrivé quelque chose.
Je me complaisais dans ce luxe, sans vraiment me demander d'où venait l'argent qui m'habillait, l'argent qui me nourrissait et tous ces détails qui ne m'intéressaient guère. Je préférai rester avec les chevaux, dans mes belles robes de soie. Un jour que j'étais tombée dans le fumier, ma mère décida de demander à une couturière de me tailler une tenue d'équitation sur mesure, et dès lors, je me promenai fièrement avec, sous le regard amusé des servantes. Oh ! Comme je me sentais bien dans cette tenue, sans avoir toujours à soulever ma robe pour monter les escaliers. Je pouvais courir librement, et après quelques mois d'hésitations, j'osai enfin demander à mon père de m'apprendre à monter à cheval. Je crois que je me souviendrai toujours de son refus violent et borné, qui avait résonné dans tout le manoir. Ma mère était tout de suite arrivée en courant, demandant à son époux la raison de cette
colère démesurée. Quand elle eut apprit la cause, à mon grand étonnement, elle plaida en ma faveur. Après de longues discussions à peser le pour et le contre, mon père accepta enfin, et le cri de joie que je poussai sans retenue me valut un regard foudroyant qui me calma de suite. Ma préceptrice de bonnes manières m'avait pourtant expliqué qu'en toutes circonstances, je devais garder mon sérieux et masquer mes émotions, même ma joie la plus intense.
Mes cours d'équitation commencèrent le lendemain en compagnie d'un professeur renommé pour sa grande maîtrise des chevaux. Comme j'avais un peu grandi, je portais fièrement une nouvelle tenue, assise confortablement sur la selle de ma
jument alezane. J'adorais toucher son poil tout doux, et me réchauffer contre elle quand j'avais froid. J'adorais chevaucher en compagnie de mon professeur qui, malgré sa réserve première, se laissait aller petit à petit. J'étais encore jeune mais je commençais déjà à vouloir
plaire. Quand je n'étais pas à cheval, je soignais mes robes, les lissant avec attention et j'écoutais encore plus ma préceptrice. Elle me répétait, elle aussi, que si je voulais trouver un bon mari, je devais prendre soin de ma personne. Alors c'est ce que je fis.
Je me rappelle aussi la première
soirée à laquelle mes parents m'emmenèrent, dans l'espoir de me trouver un homme auquel ils pourraient me
marier. Mais moi je ne voulais pas. J'avais toujours été obéissante, mais j'approchais de mes quinze ans et je me rebellais à l'idée d'épouser quelqu'un contre mon gré. Cette idée prenait de plus en plus de place dans ma tête, et j'échafaudais quelques plans dans ma tête pour m'en aller le plus loin possible. Oh ! J'aimais mes parents plus que tout, mais je ne supportais pas l'idée de n'être qu'une simple femme sans valeur que l'on pouvait marier sans vergogne à un homme peut-être riche, mais laid et vieux.
Quelques temps plus tard, quelques mois après mon
anniversaire en vérité, j'empruntai –volai- une carte bancaire remplie aux as en sachant parfaitement que mes parents n'oseraient jamais me couper les vivres et je m'en allai. J'avais préparé mon sac avec un tas d'habits bien plus confortables que mes robes, des provisions pour quelques jours –biscuits secs principalement, et une bouteille d'eau, mon passeport dont je me demandai comment j'avais fait pour l'avoir vu que je n'avais jamais voyagé de ma vie et surtout, j'étais allée dire adieu à ma
jument adorée. J'avais eu les larmes aux yeux en la voyant, mais maintenant que j'étais dans le taxi qui m'emmenait jusqu'à l'aéroport, je repensai à tout ce que je laissais derrière moi. Je m'efforçais de croire que je le faisais sans regret, mais c'était faux. Je me mentais. En vérité, j'aurai tout donné pour rester chez moi, sauf de me marier contre ma volonté.
Arrivée à l'aéroport, j'achetai un
billet d'avion en première classe pour l'avion qui allait décoller.
Japon. Dans une ville inconnue au bataillon. C'était parfait. C'était à l'opposé du manoir, et mes parents ne viendraient jamais me chercher là-bas. Je m'empressai de courir jusqu'à la porte d'embarquement, montrai mon passeport en priant pour qu'il soit valide, et m'engouffrai enfin dans le couloir qui menait jusqu'à l'avion même. Quand je fus bien installée dans les sièges confortables de la première classe, une hôtesse vint me demander si je voulais quelque chose, et je répondis que par la négative. Quelques minutes plus tard, j'étais déjà endormie.
Je me réveillai une quinzaine d'heures après, lors de l'atterrissage. Je descendis de l'avion en vitesse, et dans l'aéroport, une affiche immense attira mon regard.
Pension Kohime. Pas cher et pratique. Bla bla bla … Parfait ! Vraiment parfait ! J'hélai un taxi, et lui ordonnai de m'emmener là-bas. J'allai pouvoir commencer une
nouvelle vie. "
" On dit de moi que je suis jolie mais je préfère vous laisser juger. Assez petite, je dois mesurer dans le mètre cinquante-cinq, et mon poids est idéal. Je ne me trouve ni trop mince, ni trop grosse. Je suis fine, voilà. Et malgré ma petite taille, je suis assez élancée. Un peu paradoxal, je l'avoue. J'ai la peau très blanche car mes parents ne m'ont jamais autorisé à sortir sans gants, chapeau et ombrelle. Même quand je faisais de l'équitation, j'avais des gants et une bombe. Oh ! Et puis ... je rougis très facilement. Au moindre compliment, mes joues deviennent écarlates. A la moindre honte, elles se colorent en rouge vif. Au moindre mensonge, elles rosissent légèrement. C'est assez gênant, je dois l'avouer ...
En ce qui concerne mon visage … Mes cheveux bruns aux reflets roux sont mi-longs et m'arrivent un peu en dessous des épaules. Je les attache toujours en deux couettes sur le côté, avec des élastiques de toutes les couleurs. Une frange cache mon front et mes sourcils. Juste en dessous, mes yeux. J'ai les yeux verts la plupart du temps, mais parfois, ils deviennent un peu bleus. Selon le soleil, peut-être. Je ne me maquille jamais car je préfère être naturelle. Les filles superficielles qui mettent des couches et des couches de maquillage … je trouve ça déplacé et vulgaire. Bon, cela doit aussi venir de mon éducation mais …! En vérité, je déteste me décrire. J'ai toujours l'impression de ne pas être objective et d'être narcissique. Mais passons. Mon nez est parfaitement placé au milieu de mon visage, et j'admire Dame Nature qui m'a donné tout ce que je pouvais souhaiter. J'ai une petite bouche toujours souriante, ce qui laisse voir mes dents blanches et alignées. Mes lèvres ne sont pas pulpeuses du tout, mais j'aime mon visage comme il est. Je suis bien dans ma peau …!
Mes bras sont longs et se terminent sur mes mains dont les doigts sont comme des doigts de fée, très fins et soignés. Je n'ai pas beaucoup de poitrine, même si celle-ci commence enfin à se développer ! Mon ventre est plat, et mon nombril ne ressort pas, pas comme pour les gens dont le cordon ombilical a mal été coupé. Je trouve cela très laid. Mes jambes sont fuselées et musclées par l'équitation. Je n'ai pas de très grands pieds, et cela me convient parfaitement.
Question vestimentaire, cela varie. Je mets beaucoup de robes, comme celles que je mettais au manoir. Des robes de soie le plus souvent. Mais j'aime aussi être en tenue décontractée où mes mouvements ne sont pas freinés par des couches de mousseline. Je mets aussi beaucoup de couleur, car j'aime quand c'est gai. J'adore la couleur, à vrai dire. C'est tellement plus joyeux en hiver, quand il y a du rouge, du jaune ou même du vert ! "