ADA VARGAS ● I want pasta, vee ~

Ada F. Vargas

Une amoureuse-née est une franche idiote.

Nom ─ Vargas.

Prénoms ─ Ada Feliciana.

Âge ─ 16 ans.

Date de naissance ─ Le 13 mars 1995.

Nationalité ─ Italienne.

Orientation sexuelle ─ Hétérosexuelle.

Profession ─ Lycéenne et serveuse.

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Groupe ─ So Stupid.

Code ─ Make pasta, not war !

Description physique

À première vue, Ada est une jeune femme totalement ordinaire. Mademoiselle tout-le-monde, en fait. Mais comme ça va faire pas loin d'une heure que vous vous ennuyez sur ce banc, exposé à tous les vents, sans une once d'envie à l’idée d'ouvrir le livre dont votre professeur de japonais ancien veut une analyse pour le lendemain, vous n'allez pas dire non à un peu de distraction et levez donc les yeux. Subjugué par cette jeune et jolie demoiselle à la démarche gracieuse, vous ne cesserez de la contempler que lorsqu'elle aura disparu de votre champ de vision, et comme ce moment-là n'est pas encore près d'arriver, je vais gentiment vous la décrire en détail ♥

Du haut de son mètre soixante-huit, Ada semble de taille relativement normale, ce qui ne l'empêche pas pour autant de complexer quand elle se tient aux côtés de son ami germanique d'un mètre quatre-vingt. Pas de quoi s'affoler me direz-vous, mais personnellement je n'ai jamais vu quelqu'un sans complexes. Mais rassurez-vous, il n'y a que sa taille, pourtant normale, qui gêne Ada, du reste, elle se sent bien dans sa peau. Une silhouette svelte et bien tracée, avec des formes comme il faut et là où il faut, voilà ce qui fait poser les regards masculins sur elle, en règle générale. Je dois bien vous avouer qu'elle fait partie de ce genre de filles agréables à regarder, le genre de filles sur lesquelles vous posez le regard sans pouvoir la quitter des yeux par la suite.

Ada possède un teint ni trop pâle ni trop hâlé, un mélange parfait (plus rosé que bronzé, je vous l'accorde), qui la différencie des Japonais à la peau claire. La sienne est d’ailleurs uniforme et sans cicatrice apparente (j'ai bien dit apparente ...), douce comme la peau de ces fruits pelucheux tels que la pêche. Et à défaut d'avoir un teint de parfaite méditerranéenne, Ada en a au moins la gestuelle, incapable de parler sans agiter les mains dans tous les sens, à croire que ses mots sont moins expressifs s'ils ne sont pas ponctués de grands gestes.

Passons au visage à présent : clair, les courbes gracieuses, il respire la douceur. Y prennent place deux grands yeux noisettes aux reflets ambrés bordés de longs cils, un petit nez retroussé, ainsi qu'une bouche perpétuellement souriante aux lèvres pulpeuses et vermeilles, le tout encadré d'une cascade de cheveux auburns ondulés (d'où dépasse éternellement un long épi bouclé), relevés la plupart du temps en une queue-de-cheval dont deux mèches tombent de chaque côté du visage.

Ça y est, cette voluptueuse jeune femme passe devant votre banc, maintenant. Elle ne vous remarque pas, bien que vous ayez le regard rivé sur elle depuis tout à l'heure, et continue son chemin, passant d'un sentier de terre battue à une allée pavée. Vous tendez alors inconsciemment l'oreille au son de ses pas, et discernez après quelques instants une chose d'étrange. Ses deux pieds produisent un son différent l'un de l'autre, rendant sa démarche assez asymétrique à l'oreille : tap tonp, tap tonp, tap tonp. Même si c'est amusant de vous voir chercher en vain une raison, je vais vous aider et vous la donner : à cause d'un violent accident de train, Ada à perdu la partie inférieure de sa jambe droite, très récemment. Elle porte désormais une prothèse qui prend place en dessous du genou, remplaçant ce qu'elle a perdu et qu'elle ne retrouvera pas : mollet, cheville et pied. Elle n'aime pas le montrer et dissimule perpétuellement sa prothèse sous des collants ou des chaussettes montantes. En réalité, Ada possède deux prothèses : une qui est la représentation quasi-parfaite d'un membre humain, et l'autre qui est entièrement métallique - peu esthétique, je vous l'accorde. Paresseuse, Ada néglige bien souvent de remplacer sa prothèse métallique par l'autre avant de mettre le nez dehors, mais il pourra vous arriver de la voir jambes découvertes, bien que ce soit plutôt rare.

Description morale

On pourrait croire, avec ce qui est noté ci-dessus, qu'Ada est le genre de fille super populaire dans son école, belle, riche, intelligente, courageuse, rationnelle ... Pour tout dire, il n'y que populaire et belle qui ont raison d'être dans la liste, pour le reste il faudra repasser.

Ada ne possède pas un caractère simple à décrypter, il est composé de multiples facettes, caractères et états d'esprit qui ne la rendent pas aussi prévisible qu'on pourrait le croire. Tout d'abord, c'est indéniable, Ada est loin d'être la plus intelligente au monde. Elle s'approche plutôt de la fin du classement. C'est peut-être d'ailleurs l'une des causes de son effarante naïveté aux tendances enfantines, ce qui l'amène à avoir une confiance démesurée en ses interlocuteurs et à croire en tout et n'importe quoi. Cette naïveté, comique aux premiers abords, est en réalité assez désavantageuse : en effet, beaucoup se jouent de l'italienne qui est souvent sujette à des mauvaises blagues ou menée en bateau, mais elle n'en tient pas compte, pas rancunière pour deux sous.

Ce qui nous amène à un deuxième point : non contente d'être une idiote, Ada est aussi une joyeuse idiote. Sa joie de vivre, sa bonne humeur omniprésente et son sourire perpétuel pourraient lui donner l'air de quelqu'un de jovial, mais couplée à la naïveté énoncée précédemment, cela ne réussit qu'à lui donner davantage l'air stupide. En plus d'être enjouée, l'italienne possède un côté câlin et affectueux, qui la pousse à coller démesurément ses proches et ouvre sur une sociabilité sans bornes. Elle ira volontiers aborder de parfaits inconnus, encore plus si ces inconnus sont de sexe masculins. Dans ces moments-là, on a du mal à reconnaître l'Ada habituelle, grande gamine, innocente, naïve ; mais une jeune femme, une vraie, charmante, charismatique, moins idiote, plus correcte et plus sérieuse, mais pas encore assez. Ce sont ces traces de son caractère habituel qui amusent la gent masculine et font son succès, ainsi que sa popularité au sein de son lycée.

Pour en revenir à ce que nous disions, même le sourire éclatant et impérissable d'Ada possède ses inconvénients. Car, voyez-vous, être affectueuse, sympathique, adorable, câline, c'est bien, mais ça peut finir par devenir excessif. Un peu d'affection, c'est bien ; trop, c'est énervant, insupportable. C'est là le principal trait de caractère d'Ada - et aussi le plus agaçant. C'est une vraie gamine qui ne se lasse jamais de communiquer son affection à ceux qu'elle aime à grand renfort de câlins prodigués à tout va et autres choses du genre. Dans ces moments-là, on a bel et bien envie de tuer Ada afin qu'elle devienne plus sérieuse, mais c'est peine perdue, il vous faudra supporter à longueur de temps une italienne croisée à un bisounours humain.

Enfantin, c'est le mot qui convient parfaitement pour décrire en quelques lettres sont caractère. Idiote, perpétuellement souriante, trop affectueuse, voilà qui la rend déjà difficile à supporter, et pourtant d'autres facettes de son caractère viennent encore compléter le tableau. Fidèle à son comportement enfantin, notre italienne n'en est pas moins très craintive, effrayée par tout et n'importe quoi. Rester seule, être dans le noir, ne plus être aimée de ses proches ou les perdre, faire face à la violence, et j'en passe, en présence de tout cela Ada se transforme en une faiblarde pleurnicheuse et incapable - à l'exception d’implorer de l'aide.

Très paresseuse, Ada apprécie peu de faire des efforts, excepté lorsqu'il s'agit de cuisiner, de manger et de dessiner, autant de domaines qui ne la mèneront pas très loin. Elle adore dormir et affectionne par-dessus tout sa sieste de l'après-midi, qu'elle effectue en générale très peu vêtue - voir parfois pas du tout, mais bon, tout lit a des draps, hein. Ce qui nous amène à un autre point qui rend Ada extrêmement pénible, c'est qu'elle peut très facilement tenir des propos ou faire preuve d'un comportement plus qu'embarrassants, sans ce soucier le moins du monde de la gêne qu'elle occasionne, mais devenir timide et rougissante lorsque les rôles sont échangés et qu'elle doit faire face à ces propos ou comportements embarrassants à son tour, sans qu'elle ne réalise qu'il s'agit exactement de ce qu'elle fait subir aux autres, vous comprenez ?

Bien qu'après avoir lu cela vous vous dites sûrement qu'elle a huit ans d'âge mental - ce qui n'est pas si faux -, laissez-moi vous dire qu'Ada possède tout de même ses instants de sérieux. Dans ces moments-là, elle étonne tout le monde tant on ne la reconnaît plus. Mais aussi gamine soit-elle, l'italienne est capable, quand elle le veut, d'être mélancolique, d'adopter une attitude grave ou de pleurer sincèrement - c'est-à-dire ne pas pleurnicher comme elle le fait quand quelque chose l'effraie.

Dernière édition par Ada F. Vargas le Jeu 30 Juin - 20:34, édité 58 fois

Histoire

Jardin, demeure des Vargas, Italie, été 1998.

- Je t'ai eu ! gazouilla une petite voix d'enfant.

Sur cette exclamation, la fillette tenta de refermer sa petite main sur le papillon blanc qu'elle poursuivait depuis quelques instants, mais ce dernier lui échappa dans un gracieux battement d'ailes. L'enfant revint à la charge mais le papillon s'envola au-delà des grillages du jardin, le rendant hors d'atteinte.

- Ne t'en vas pas ! fit la fillette d'une voix dépitée.
- Allons Ada, laisse donc ce papillon tranquille. Viens plutôt à l'ombre, tu vas attraper une insolation à force de rester au soleil comme ça.
- Oui Grand-père !

La fillette courut en direction de son grand-père, puis, arrivée près de lui, s'installa sur ses genoux.

- Dis Grand-père, elle est où Maman ?
- Ada ... Je te l'ai déjà dit, elle est avec les anges.
- Et Papa aussi ?
- Oui.
- Et les anges ils vont nous emporter aussi ?
- Bien sûr que non, ta sœur et toi n'avez que trois ans.
- Et à partir de quel âge on peut aller les voir ?
- Ne sois pas trop pressée, fit son grand-père en riant. Ce jour n'est pas encore venu, bien heureusement.
- Mais moi je veux voir Papa et Maman !
- Tu les verra un jour, mais tu dois vivre d'abord.
- Vivre ?
- Oui, vivre pleinement. Sans rien oublier, en gravant chaque souvenir au fond de ton cœur.

Chambre, orphelinat, Japon, 2001.

- T'as rien oublié ?
- Je crois que non.
- Vérifie encore une fois, je te connais ...
- Tu peux pas me faire confiance pour une fois ?
- Hmmmmm ... Non.
- Bon, ça va, je vais vérifier ...

Sur un long soupir, Ada traversa la chambre et pénétra dans la salle de bain. Quelques minutes après, une exclamation se fit entendre :

- Ah ! Ma brosse ! Mes rubans !
- Qu'est-ce que je disais ...

Ses affaires à la main, Ada sortit en trombe de la salle de bain et mit le tout dans son sac, avant de le refermer. Puis elle leva les yeux vers sa sœur jumelle :

- Lavinia ?
- Hm ?
- Puisque nos deux familles adoptives habitent loin l'une de l'autre, on ne se verra plus très souvent ... Ce serait drôle si on se coupait les cheveux avant de se séparer, non ?
- Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle là-dedans ... M'enfin, si ça peut te faire plaisir ... De toute façon mes cheveux me gênent.

Les jumelles dénichèrent une paire de ciseaux et en peu de temps, le parquet fut jonché de mèches auburn.

Jardin, résidence des parents adoptifs d'Ada, Japon, 2007.

- À nos six ans d'amitié !

Les deux enfants trinquèrent et vidèrent leur verres de soda.

- Six ans, jour pour jour ... murmura nostalgiquement le garçon.
- Héhé ~ On en a fait des bêtises pendant tout ce temps !
- Et comment ! ... Tes cheveux ont quand même sacrément poussé par rapport au jour où on s'est rencontrés !

Pour toute réponse, Ada adressa un sourire énigmatique au garçon blond, qui replongea le nez dans sa boisson.

- Hmm ... Misaki, je dois te dire quelque chose ...

Soudain gênée, l'italienne posa son verre près d'elle et entortilla une mèche autour de son doigt, le regard fuyant.

- Je suis désolée de te dire ça aujourd'hui ... Mais je l'ai appris hier et ... C'est très précipité ...
- Quoi donc ? fit le garçon en vidant son verre.
- Je ... je déménage. Je pars. Dès ce soir.

En guise de réponse, Misaki cracha bruyamment la gorgée de soda qu'il avait en bouche. Il s'essuya les lèvres d'un revers de main et se tourna vers son amie, la mine défaite :

- Q-Quoi ? Mais non, c'est impossible, tu ne peux pas partir, tu ne peux pas me laisser !

Ada remonta les genoux contre sa poitrine, les yeux baissés.

- Désolée. C'est pour le travail de Papa. On doit partir dans peu de temps.
- Allons, allons, c'est pas si grave, on pourra se revoir. Tu déménages où ?
- ... Dans la capitale.
- C'est pas possible ! gémit le garçon. C'est beaucoup trop loin !

Ada se releva, les yeux humides, et Misaki l'imita.

- Je suis désolée, répéta-telle.
- Allons, ce n'est pas de ta faute. On se reverra bien un jour.
- Tu crois ?
- J'en suis certain.
- ...
- T-Très bien, alors il est temps de nous dire au revoir. Qu'est-ce que vous faites avant de vous quitter, en Italie ?
- Un ... Un bisou.
- Allons, souris, on ne se dit pas adieu ! Tiens, fais donc un bisou ici, alors, fit-il en tapotant sa joue avec un sourire.

Ada s'exécuta, mais au moment où elle allait effleurer la joue de Misaki, il tourna brusquement la tête et pressa ses lèvres contre celles de l'italienne. Cette dernière rougit jusqu'à la racine des cheveux mais ne le repoussa pas pour autant, et se laissa même aller à ce doux contact. Au bout de quelques instants qui lui parurent une éternité, Misaki se sépara d'elle. Les joues écarlates, il planta ses yeux dans ceux d'Ada et lui avoua :

- Je t'ai aimée dès le jour où je t'ai vue. Je ... Je suis désolée de t'avoir surprise comme ça. Je ne veux pas que tu partes. Est-ce que ...
- Oui, coupa Ada.

La réponse avait fusé, surprenant le jeune blond. Ada, bien que confuse et rougissante, se doutait de la question qu'il allait poser et était sûre de sa réponse, elle-même s'étant éprise de Misaki à force de le connaître.

- Oui, répéta-t-elle, moi aussi.

Pour toute réponse, le garçon s'avança vers elle et la prit dans ses bras. Ada lui rendit son étreinte.

- Je te promets que nous nous reverrons un jour, murmura-t-il. Je te le promets.
- M-Moi aussi.
- Même si la distance nous sépare et que je ne sais pas quand nous nous reverrons, je serais là, fit-il en posant une main sur le cœur d'Ada.

Un cri les interrompit :

- Ada, nous allons partir ! Dépêche-toi !

Elle se sépara de Misaki et courut vers sa mère adoptive.

- Je t'attendrais ! s'écria ce dernier. Je t'attendrais parce que nous nous sommes promis ! Nous nous reverrons un jour, sois-en sûre !

Ada se retourna vers lui, et lui adressa un dernier sourire larmoyant avant de s'engouffrer à l'intérieur de la maison qu'il lui faudrait quitter dans les instants à venir.

Chambre d'Ada, hôpital tokyoïte, Japon, 2010.

Cela ne faisait pas dix minutes que Lavinia s'était rassise au chevet de sa sœur jumelle, profondément endormie, que l'on toqua de nouveau à la porte de la chambre.

- Si c'est encore cet abruti de journaliste, grommela-t-elle, je vais le renvoyer chez lui à grands coups de pied dans le ...
- Mademoiselle ! l’interrompit la voix offusquée de la vieille infirmière qui venait chercher les draps sales.
- Oh vous, je ne vous ai rien demandé ! Si ma façon de parler ne vous plaît pas, je ne vous retiens pas ! Et sachez que j'ai l'intention de renvoyer tout aussi poliment tous ceux qui viennent emmerder ma soeur ! gronda-t-elle en appuyant ironiquement sur le poliment.

En affichant une mine de reine offensée, la vieille femme tourna les talons, emportant avec elle son chargement de draps. Lavinia lui tira la langue, puis se leva pour ouvrir la porte.

- Encore vous ! s'exclama-t-elle en reconnaissant le journaliste sexagénaire qu'elle avait envoyé paître une dizaine de minutes auparavant. Je vous préviens, je n'ai rien à vous dire !
- Quelques précisions, rien de plus ! implora le vieil homme.
- Vous savez où pouvez vous les mettre, vos précisions ? gronda Lavinia en claquant la porte.
- Quel caractère ! commenta le journaliste d'un ton plus amusé que réprobateur.

L'italienne l'ignora et se rassit près de sa sœur, toujours aussi profondément endormie, et lui murmura :

- Surtout continue de dormir ! Si tu savais la foule de journalistes qui se bouscule à ta porte pour écrire un article sur "la miraculée du tragique accident de train de Tokyo" ... Ces journalistes en rajoutent toujours trop ! soupira-t-elle.

Ada n'émit aucune réaction et continua de sommeiller. Sa sœur jumelle veilla sur elle en silence, quand, environ quinze minutes après l'intrusion du journaliste, trois coups résonnèrent de nouveau à la porte.

- Oh mon Dieu, râla-t-elle, si c'est encore lui, je le termine à coups d'appareil de perfusion !

Elle ouvrit tout de même la porte. Un autre homme lui faisait face, plus jeune, visiblement accompagné d'un stagiaire, pauvre garçon qui se dissimulait derrière son mentor.

- Oui ? fit-elle d'un ton las.
- C'est pour écrire un article sur ...
- Oh, mais c'est que vous êtes le premier de la journée, coupa Lavinia avec ironie. Allez ouste, j'ai assez vu vos collègues.
- Si vous me laissez écrire, tenta l'homme, je ferais passer mon article à mes collègues, comme vous dites, et ils vous laisseront tranquille.

Il avait touché un point sensible. Lavinia demeura songeuse quelques instants, puis tira brusquement le pauvre stagiaire par la manche pour l'entraîner dans la chambre avant de claquer la porte derrière eux.

- D'accord, mais c'est à lui que je parle ! Vous, votre tête ne me revient pas !

Elle entendit l'homme soupirer puis s'éloigner. La mine satisfaite, elle se tourna vers le pauvre garçon qui ne savait plus où se mettre, et lui lança d'un ton peu amène :

- Bon, tu as de quoi noter ? Parce que je ne compte pas répéter ce que je m'apprête à dire !
- O-Oui, bredouilla-t-il. J'ai mon calepin.
- Alors allons-y, je n'ai pas tout mon temps, j'ai une sœur à veiller, moi.
- V-Vous pouvez y aller, je suis p-prêt.
- Vous voulez vraiment la biographie complète de ma sœur ?
- O-Oui.
- Bien ... Alors, Ada et moi sommes orphelines. Notre mère est décédée en nous donnant naissance et mon père n'a pas pu supporter son absence et a mit fin à ses jours. ... Un seul mot de pitié, gronda-t-elle en voyant le stagiaire ouvrir la bouche, et je te fais bouffer ton carnet. Clair ?
- T-Très clair.
- Bon. Notre grand-père s'est alors occupé de nous. Il a beaucoup vécu au Japon et nous y a emmenées alors que nous avions cinq ans. Dans l'avion, il a fait une attaque cardiaque et les secours n'ont pas pu le ranimer. Ma sœur et moi avons donc été placées en orphelinat. Nous avons été adoptées séparément l'année d'après, moi par une famille monoparentale (un homme, note bien ça), elle par un couple sans enfants. Ensuite, nous avons vécu chacune de notre côté, nous nous rendions peu visite (nos deux familles habitaient loin l'une de l'autre). Bon, tu notes toujours ?
- O-Oui.
- À douze ans, elle a déménagé dans la capitale. Et il y a un peu plus de douze heures, elle a prit le train pour rentrer à l'internat de son lycée, plutôt éloigné d'où habitent ses parents adoptifs. Comme tu peux le voir, soupira-t-elle, le week-end se finit mal pour elle. Son train a eu un accident. Inutile d'entrer dans les détails, tu es sûrement déjà au courant. Et elle a eu la partie inférieure de la jambe droite littéralement arrachée dans un suraccident.

Le garçon se crispa, osa lever les yeux en direction du lit d'Ada, mais se ravisa en apercevant un épais bandage sanguinolent.

- À cause de l'accident, les parents adoptifs d'Ada ont eu droit à tout un pataquès judiciaire sur la responsabilité, gnagnagna ... Ils ont perdu leur droit de garde. Donc ma sœur va devoir loger chez des amis en attendant de trouver une autre solution ...

Lavinia s’interrompit, les yeux perdus dans le vague. Un long silence s'étira, durant lequel le stagiaire, tout tremblant, n'osa piper un seul mot.

Bon, maintenant tu as ce que tu veux, alors ouste ! le chassa Lavinia, retrouvant toute sa dureté. Et dis à ton patron que si un seul journaliste revient nous voir, je ne réponds plus de rien ! gronda-t-elle en poussant le garçon dehors.

Salon, appartement des Beilschmidt, Japon, 2011.

Il devait être environ neuf heures du matin. Gilbert Beilschmidt était sorti depuis longtemps, sa sœur jumelle était dans sa chambre et leur petit frère, du même âge qu'Ada, prenait son petit-déjeuner dans la cuisine. Celle-ci, d'ailleurs, ronflait comme une bienheureuse sur le canapé du salon. Quelqu'un pénétra soudain dans la pièce, aussi silencieux qu'une ombre, et s'avança vers l'endormie. La silhouette retira la couverture d'Ada (heureusement que cette fois-ci, elle portait une chemise de nuit) et décrocha précautionneusement sa prothèse, qu'il (ou elle) déposa aux pieds du canapé. Puis la silhouette approcha le visage de l'oreille d'Ada et se mit à crier :

- DEBOUT ENDORMIE ! TU VAS ÊTRE EN RETARD EN COURS !

Ce qui eut pour effet immédiat, vous vous en doutez, de réveiller l'italienne en sursaut. Elle sauta du canapé pour courir d'habiller et ... s'étala de tout son long. Le dernier de la fratrie Beilschmidt entra dans la pièce pendant qu'Ada était occupée à pleurnicher, le nez par terre.

- Mais qu'est-ce qui t'arri - ... Ah, fit-il en comprenant.

Un regard à la prothèse détachée et à sa grande sœur qui écarquillait les yeux d'un air innocent lui permit de comprendre.

- Julchen, soupira-t-il, tu ne pourrais pas éviter ce genre de blagues le dimanche matin ? Et pour son dernier jour ici, en plus ...
- C'est ma façon de lui dire au revoir !
- Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ... Allez file, Gilbert t'attend.

Sur un sourire énigmatique, Julchen attrapa une veste et quitta l'appartement. Son petit frère se leva pour aller chercher la prothèse d'Ada et la tendit à cette dernière qui se redressa et cessa de geindre pour la remettre en place.

- Désolé pour ma sœur ... Tu la connais, elle aime te taquiner.
- Ce n'est rien, sourit l'italienne tout en secouant la jambe pour voir si tout ce beau monde fonctionnait encore.

Elle se releva et tira sur les bords de sa chemise de nuit.

- Bon, fit-elle d'une voix enjouée, comme s'il ne s'était rien passé. Je prends mon petit-déj, j'attrape mon sac et je ne vous embêterais plus ~
- Tu sais très bien que tu ne nous embêtais pas. On avait pas le choix. Le loyer est déjà assez dur à trois dans un minuscule appartement, alors à quatre ça devient impossible - même avec ta paye de serveuse. Mais ne t'inquiètes pas, on se reverra au lycée, puis tu pourras revenir dormir de temps en temps. Et puis la pension, ce n'est pas si terrible que ça !
- Je n'en ai jamais douté, répondis malicieusement l'intéressée.
- Tant mieux. Bon, on mange et je t'accompagne, d'accord ?
- D'accord ! ~